
Lorraine de Sagazan et Guillaume Poix semblent avoir passé du temps durant les audiences pour en saisir la teneur, l'ambiance. Et ils ont clairement choisi leur camp. Si les prévenu·es conservent une attitude naturelle, écorchée, émotionnellement chargée (les tirades de Jeanne Favre et de Jisca Kalvanda dans La Voleuse sont incroyables), juges et proc sont animés de gestuelle mécanique pour mieux appuyer le fait qu'ils appliquent bêtement cette loi qui nie totalement le parcours des gens, une gestuelle qui les deshumanise jusqu'au grotesque.
Léviathan est une pièce à charge contre ce dispositif autoreproductif, interrogeant son bien-fondé et fournissant quelques réponses également, notamment la gestion privatisée des lieux de détention qui ont besoin de chair fraîche pour exister. Car l'essentiel de ces jugements entraîne automatiquement des peines de prison, les prévenu·es n'ayant pas le temps ni l'opportunité d'être défendu·es de manière efficace par des avocat·es commis·es d'office qui découvrent bien souvent le dossier 15 minutes avant l'audience. La pièce ouvre quelques - timides mais réelles - brèches vers la justice réparatrice, processus encore marginal dans nos sociétés occidentales mais dont les études sur le sujet sont de plus en plus nombreuses.
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