La stratégie des antilopes c'est la manière qu'ont ces dernières d'échapper à leurs prédateurs, de ne pas rester en groupe et de s'éparpiller dans la nature pour avoir plus de chances d'en réchapper. C'est aussi celle employée par les tutsis, pour échapper aux hutus lorsque ceux-ci, prenant pour prétexte l'assassinat du président rwandais, se lancent d'avril à juillet 1994 dans une tuerie qui laissera sur le carreau des milliers de morts au seul prétexte de leur ethnie.
Dans ce dernier tome de cette série de témoignages intitulée Récits des Marais Rwandais, Jean Hatzfeld décrit le retour au pays des génocidaires après des années de détention dans la prison de Rilima. Un retour qui ne va pas se faire sans mal même s'il s'effectue tout en contrition et discrétion pour la plupart. Dans un objectif de réconciliation nationale, l'Etat a demandé aux victimes et à leurs descendant·es d'accueillir ce retour de la manière la moins véhémente possible. Vaste projet.
En mélangeant les narrations, Hatzfeld prend de la distance avec le texte, laissant clairement la parole aux protagonistes tout en gardant une certaine neutralité. On navigue alors entre les mots des uns et des autres dans une ambiance à l'apparence "sereine" même si l'on devine derrière ces mots choisis et restitués que le ressentiment est bien présent pour ces familles ayant perdu pour la plupart un ou plusieurs parents, forcées aussi d'accepter le retour de leurs voisins tueurs avec, dans un coin de l'esprit, la crainte que cela puisse recommencer.
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