How far Jerusalem, Holy Land but not the Paradise

יום שני (lundi)

 J'aurais cru l'arrivée en Terre Promise plus compliquée que ça. En fait, même si l'équivalent de la sécu Tisseo dans le métro est armé de mitraillette, aucune tension n'a l'air palpable. Même le passage tant redouté à l'aéroport s'est passé comme une fleur, alors qu'à Munich c'est toujours la galère. On crèche au Petra Hostal, juste après la tour de David. Sur les photos promo, c'est le palais des 1001 nuits avec une vue imprenable sur le dôme du Rocher et sur la tour de David, des chambres cossues. Sur place, le palais a largement perdu de sa fraîcheur d'antan. Les draps ont dépassé la date d'utilisation et une odeur de pied tenace surnage dans la pièce. Pour se changer les idées, on part en urbex de nuit dans le quartier arménien. Pas mal de boutiques pour touristes dans le coin mais fermées, ce qui est normal étant donné l'heure tardive.

Entrée par la porte de David

David st


יום שלישי (mardi)

Hormis quelques plaques commémoratives dans les rues et des militaires de Tsahal positionnés à des endroits stratégiques, aucune tension ne semble palpable. Dans Jérusalem tout le monde se croise et se côtoie et à l'air de vivre dans une cohabitation fragile mais réelle. L'accès au mur occidental (kotel) est sévèrement surveillé par des portiques de sécu aux quatre coins de la place comme dans les aéroports. L'espace est divisé en deux parties, une occupant les 3/4 du mur pour les hommes, le quart restant pour les femmes. Perdu au milieu de tous ces croyants psalmodiant, je reste béat devant cette ferveur, cette sensation de se sentir appartenir à quelque chose, avec la certitude de ne pas pouvoir y échapper. Parmi eux, beaucoup de jeunes en oraison devant ce mur légendaire. Au loin, lorsque résonne l'appel du muezzin, les prières s'intensifient, a priori pour tenter de couvrir ces appels, pour essayer de ne pas se laisser distraire par les voisins. Les femmes pleurent devant le mur et reculent en ne le quittant pas des yeux dès qu'elles ont terminé, au contraire des hommes, blasés. 

Vue sur le kotel : au premier plan l'espace réservé aux femmes

Le kotel vu de face : fête des troufions

Le kotel by night

De la ferveur il y en avait ce matin également au Saint-Sépulchre, édifice supposé s'élever sur le lieu de supplice du Christ et dont la rotonde renferme son tombeau. Des groupes de partout s'y retrouvent, slovaques, bulgares, vietnamiens, pour pénétrer le dos courbé dans la petite alcove dans laquelle nous est accordé même pas une minute par le cerbère de l'entrée qui agite sa crécelle lorsque le temps est écoulé. La pierre de l'Onction dans le vestibule est envahie de croyant·es laissant traîner une étoffe, baisant la pierre. Cette pierre est supposée être celle sur laquelle a été déposé le Christ après sa crucifixion mais celle-ci date du 17e siècle, la précédente ayant été enlevé car les croyant·es avaient pris l'habitude de barboter un morceau à chaque prière. 

Au premier étage ont pris possession des lieux les Ethiopiens qui y possèdent un monastère. Par un cagnard d'enfer, une poignée de moines vivent sur le toit de l'église à l'abri du tumulte d'en dessous. La tradition veut que, la communauté ne pouvant payer la chapelle qu'ils entretenaient dans la nef principale, elle a été reléguée sur le toit du Saint-Sépulchre. 

Lumière entrant dans la nef du S.S.


Les croyant·es sur la pierre de l'Onction

Le couvent des Ethiopiens



Le soir on tombe sur un collectif qui prépare une cantine solidaire communiste. On est invité à participer à une manif de soutien.

יום רביעי (mercredi)

Le proprio de l'hotel passe son temps à fumer dans le hall avec ses collègues. L'ambiance est un poil chelou mais on s'en fout un peu puisqu'on passe l'essentiel de nos journées dehors.

Yad Vashem se situe dans Jerusalem Ouest, au terminus du tram. Le mausolée nous impose une austérité pesante qui détonne avec le paysage méditerrannéen des alentours. Devant les images qui défilent sous nos yeux, impossible de ne pas penser à notre propre culpabilité, celle d'avoir laissé commettre tout ça sans broncher. De part et d'autre d'une longue tranchée les salles décrivent la Shoah dans les divers pays d'Europe, dont l'un des points d'orgue est la reconstitution d'une rue du ghetto de Varsovie. Ce mausolée est aussi celui des puissances occidentales qui ont laissé dans la Shoah toute la dignité et la solidarité dont il aurait fallu faire preuve pour éviter ça. En sortant de 4 heures de visite, nous entrons dans le pavillon des enfants dans lequel une voix égrène le nom, le prénom et l'âge de chacun·e d'elles ayant péri dans les camps. L'atmosphère y est insoutenable.

Avant de repartir dans la vieille ville, on fait une pause détente à Nahelat Shiva. Un commerçant avec qui nous sympathisons nous offre la photo de Rabbi Mendel, rabbin mythique décédé il y a une vingtaine d'années à New York et dont la photo orne beaucoup de vitrines.

Rabbi Mendel


De retour à la vieille ville, nous tentons une approche de Haram el Sharif mais les accès sont fermées par Tsahal et la police. La visite du sanctuaire n'est possible que le matin. En repassant par le mur occidental, des cris et des chants montent du parvis. Des soldats de Tsahal fêtent leur incorporation ou la fin du service. Juste avant de manger, nous sortons par la porte des immondices et longeons le mur nous menant à la ville de David en passant par la vallée du Cédron dont les versants sont ornés de tombeaux. Nous remontons par la porte aux Lions avant de revenir par la via dolorosa, supposée être le parcours du Christ jusqu'à son supplice.

יום חמישי (jeudi)

Un jus de carottes pour démarrer dans le quartier chrétien et direction l'esplanade des mosquées. Celle-ci est presque vide lorsqu'on y met le pied. Comme les juifs n'y ont pas accès, on y accède par la passerelle en bois enjambant le mur occidental. L'atmosphère y est paisible le lieu servant aussi d'espace de pique nique pour les croyant·es qui y passent leur journée. Il est incroyable de penser que ce lieu mythique pour les musulmans, l'est aussi pour les juifs qui y psalmodient contre le mur de soutènement. Un petit détour par la maison brûlée au pied d'un escalier nous en dit davantage sur ce point de discorde et l'opposition qui règne sur le site.

Esplanade des mosquées

Dôme du Rocher

Intérieur de la vôute de la chapelle avant le Dôme du Rocher


Le quartier arménien nous offre un autre cachet, plus sobre, plus calme au travers duquel on se balade. N'importe lequel des points signalant une relation avec David devient un coin sacré pour les juifs dont une synagogue renferme dans son fond le tombeau. 

Notre-Dame de la Dormition

Nous passons l'après-midi à Jérusalem-Ouest dans Mea Sharim, quartier populaire à l'intérieur duquel déambulent les Juifs haredim de Jerusalem. Le quartier est l'un des plus pauvres de la ville et ses habitant·es mènent une vie rythmée par la religion juive ultra-orthodoxe. Les hommes sont en costumes avec chapeau et tefilines, les femmes couvertes par une perruque car elles ne peuvent montrer leur cheveux naturels aux yeux de tous. Les rares personnes qui s'y aventurent en général sont des touristes comme nous. L'accueil n'est pas hostile, tout juste indifférent. 

Les murs sont parsemés de journaux muraux où l'on peut lire les avis des rabbins sur tous les problèmes que peut rencontrer la communauté et des boites à dons sont accrochées un peu partout pour récolter du fric pour les familles.

Journal mural de Mea Sharim

Boîte à dons


 יום שישי (vendredi)

Aujourd'hui c'est jour de Shabat. Une partie de Jérusalem se ferme à toutes les activités autres que celles de se retrouver en famille après avoir bien communié. Au Kotel, l'ambiance est incroyable. Le parvis est noir de monde, chantant, dansant. Tout le monde est invité à se joindre à la parade. Et comme c'est Shabat, les détecteurs de métaux ne fonctionnent pas.

On avait anticipé le coup car on a tracé en Palestine à Bethléem. C'est à 7 km de Jérusalem, mais on fait un détour pour éviter le checkpoint 300 réputé long à passer. C'est une percée dans le mur de 750 km de long, érigé par les israéliens pour les isoler des territoires palestiniens. Des gamins essaient de se faire trois sous auprès des voitures qui le franchissent. Depuis le début de l'occupation israélienne, la Palestine ne fait que compter ses morts, qu'elle affiche sur ce mur. Entre les deux côtés, le contraste est saisissant. Si Israël brille par son côté pimpant, Bethléem affiche un côté délabré que les habitants tentent d'amoindrir par un côté accueillant à l'intérieur duquel il est difficile de distinguer tout ressentiment dans leur situation. Plusieurs années après la mort d'Arafat, le souvenir demeure dans les affiches qui ornent la ville.

A l'église de la Nativité, c'est la cohue vers la grotte où J.C. est né. Une étable marque le lieu dans un petit réduit et la grotte du lait semble à l'endroit où sa mère a allaité.

Rue de Bethléem

Eglise de la Nativité

Eglise de la Nativité

Mosquée d'Omar

Vue de Bethléem

Mur de séparation Israël/Cisjordanie


שבת (samedi)

Samedi est une journée chaude. C'est le jour que l'on choisit pour se rendre sur le mont des oliviers avec pour objectif de jeter un oeil sur Marie-Madeleine. On monte un escalier interminable pour aboutir sur un plateau qui nous offre un panorama incroyable sur le rempart est de Jérusalem et la porte close, par laquelle le messie doit rentrer. En contrebas, la vallée du Cédron avec ses tombeaux monumentaux, taillés dans un bloc que nous arpentons pour aboutir dans Jérusalem Est. Deux ambiances. Si le côté israélien offre un profil très occidental, ce côté-ci, sous autorité palestinienne, présente un aspect moins guindé. Trois gamins nous accueillent à notre arrivée qui ne nous lâcherons pas avant que Céline leur ait parlé. Au-dessus de nous, une gigantesque fresque de la tête d'Arafat surveille Jérusalem-Ouest.  

יום ראשון (dimanche)

Le dimanche on trace en loucedé de l'hôtel de peur que le patron nous demande du fric en plus. On laisse les bagages chez un commerçant - Céline marchande la garde pour aboutir à 20 shekels les deux (à l'origine c'était le double) - et on repart dans la ville pour un dernier tour avant de prendre le vol de retour. 

Le dimanche c'est le 1er jour de la semaine et l'effervescence a repris. Tous les magasins sont ouverts et nous descendons dans le quartier chrétien chez un cafétier où nous avons pris l'habitude d'aller.

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