Les braves gens ne courent pas les rues - Flannery O'Connor (1955)

Ou trop bon, trop con, c'est selon. On imagine aisément Flannery O'Connor en mémé studieuse, les lunettes sur le bout du nez en train de narrer les aventures des bouseux du sud des USA, un peu à la manière de Margarett Mitchell et ses oiseaux de Drogheeda. En fait c'est le serviteur de l'Antéchrist. Elle ne laisse même pas ses rejetons vivre tranquilou entre les champs de coton, la fierté paysanne et le dévouement au Christ. Faut toujours qu'elle mette son grain de sel, fasse entrer le démon dans la vie de tous les jours, mette à rude épreuve leur dévotion et leur dévouement religieux, manière de les éprouver, pour essayer de voir s'ils sont dignes d'entrer au paradis...Elle pourrait prendre son temps, laisser une belle histoire d'amour entre un représentant de bibles et la libre penseuse aller à son terme de la meilleure façon qu'il soit mais non, elle préfère clore le chapitre en faisant de l'amoureux transi un voleur de jambe de bois...
Les braves gens ne courent pas les rues, c'est un recueil de nouvelles mettant en scène des petites familles fermières, partagées entre l'amour de leur terre, la gestion de leurs domaines et l'inévitable nature humaine qui reprend le dessus lorsque tout cela est en danger de disparaître ou semble en danger de l'être. Derrière une écriture nonchalante, bucolique, perce une acidité matinée d'humour noir mettant à mal la supposée naturelle empathie de la campagne, montrant aussi ses doutes, ses peurs et son ignorance envers celui qui est né à plus de 150 mètres de la maison. On est loin de la violence d'un Faulkner ou d'un McCarthy mais la gravité est là, tapie dans un coin, attendant son heure et nous agrippant sans crier gare au détour d'un chapitre pour nous laisser un arrière-goût amer.

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