Le silence de l'amer - Le journal du confinement # 3


Jour # 3. Bon, ça nous pendait au nez depuis un moment. L'État a légiféré pour encadrer les mesures sanitaires en cas d'urgence. Et c'est jamais bon quand ces lois sont votées sous le coup de l'émotion, car on sait quand elles rentrent dans l'arsenal législatif mais on ne sait pas quand elles en sortent, si elles en sortent. Je vous passe les détails parce que la technique en matière gouvernementale n'est pas des plus intéressantes mais une phrase a retenu mon attention : « Il est mis fin sans délai aux mesures mentionnées au premier alinéa dès lors qu’elles ne sont plus nécessaires ». En gros c'est le gouvernement qui mettra fin au confinement quand cela ne sera plus nécessaire. Étant donné ses capacités de dialogue assez limitées on peut peut-être craindre une utilisation de cette loi largement au delà d'évènements tels que nous les vivons en ce moment, notamment pour stopper toute contestation sociale, non ? En gros, qu'est ce qui empêchera l'État de ne pas décréter d'état d'urgence sanitaire, par exemple, quand les flics balancent tellement de lacrymos dans les rues que l'air en devient irrespirable ? La lacrymo c'est dangereux pour vos petits poumons, si vous sortez il va y en avoir beaucoup, donc restez à la maison, c'est une mesure d'urgence sanitaire. Pratique.

En attendant, à la maison on commence à mieux s'organiser. On arrive même à prévoir ce qu'on va faire à manger pour deux ou trois jours à cause des déplacements limités. Même les gamines nous aident. Bon il faut un peu les pousser pour ça mais bon, l'un dans l'autre on parvient à s'en sortir. Le matin en général passe vite. Rien que de se lever et déjeuner prend pas mal de temps. Ne pas sortir l'après-midi avec un temps pareil est une hérésie lorsque tu vois des posts de potes.s.e.s à la campagne qui bronzent sur leur terrasse. Alors nous aussi on fait pareil on met les pieds sur le rebord du balcon en essayant de choper un rayon de soleil qui passe mais c'est pas évident. Passé une certaine heure il se cache derrière l'appartement qu'on a devant nous et tintin pour la bronzette. C. a mis en place un petit atelier pour fabriquer de la pâte à modeler qui les a bien tenu une heure. Après, les filles ont décidé d'aller faire un tour dans la petite cour qu'on a derrière. Pas besoin d'attestation de sortie, c'est juste au bas de l'escalier. Elles peuvent y jouer un petit moment à la balle ou au mikado géant jusqu'à qu'elles se disputent et qu'il y en a une qui remonte en pleurant. 

De mon côté je suis parti avec la grande faire du vélo sur la coulée verte - dérogation pour exercice physique, ça fait un peu stalinien, quand même - où l'on a contribué à éviter à la ville l'apparition d'un autre fléau, celui des moustiques si j'en juge par le nombre de cadavres qu'on a retrouvés sur nos t-shirts et dans nos yeux, ainsi que ceux qu'on a mangés en pédalant. Portez-vous bien.

Paz, Amor y Solidaridad.

A écouter ce jour : Rosetta - So Warm A Solitude

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