Shooters # 12

Paul Auster c'est un peu la loterie. Un coup c'est excellent, un coup c'est super moyen. Dans Invisible (2010), c'est l'histoire d'Adam Walker, jeune étudiant à l'université, qui se voit proposer par un certain Rudolf Bron, descendant du poète provençal, la direction d'un journal littéraire. Tout roule bien, le pognon est dans les caisses, Walker se tape Margot, la nénette de Bron, jusqu'à ce qu'à l'occasion d'une ballade post dînatoire, Bron pète un cable et balance un coup de couteau à un gamin qui leur promène un flingue sous le nez pour les délester de quelques billets. Cette histoire c'est Walker lui-même qui la raconte à son copain de lycée Jim parce qu'il se retrouve en phase terminale de leucémie. Du coup il charge plus ou moins ce dernier de le finir. Auster cherche toujours un alibi pour parler de New York et il en trouve toujours un même si cette fois-ci, avec son histoire démarrant par une nuit de cul pour s'achever dans une affaire d'espionnage, il tire un peu le diable par la queue. 

Quand les contemporains déconnent, autant se tourner alors vers les anciens. Evelyn Waugh n'a pas la fraîcheur bohème de Jane Austen ou l'écriture passionnelle de Charlotte Bronte mais sa poignée de cendres (1934) offre un côté cynique qui compense bien la sécheresse du texte. Les époux Last glandouillent dans leur domaine de la campagne british. Enfin, surtout Brenda. A force de détours et de prétextes, elle parvient à convaincre son mari d’acquérir un logement dans Londres, officiellement pour avoir un pied-à-terre à la capitale car Madame a repris ses études, officieusement pour pouvoir y recevoir son galapiat d'amant, John Beaver, aussi rustre que séduisant. Le décès accidentel de leur gamin au cours d'une partie de chasse à courre, est l'occasion pour eux deux de briser la glace. Waugh donne un coup de flash sur cette haute société anglaise, soucieuse des convenances et du paraître, où tout n'est que mise en scène destinée à sauver les apparences, jusqu'au moment où le naturel reprend le dessus avec violence.

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