Ian McEwan - Samedi (2005)



Samedi est le genre de bouquin qu'on lit en se demandant pourquoi jusqu'à la dernière page. Parce que Henry Perowne n'est pas Jack Bauer et que, finalement, cette journée décrite et voulue comme chaotique n’occuperait en fait qu'un petit quart d'heure d'un épisode de la vie de l'intrépide agent. En gros, 24 heures de la vie d'une famille de notables londonienne, les états d'âmes de personnes pour qui les questions vitales ne sont plus un problème. Lui est neurochurgien, elle avocate, le fils est un peu branleur mais une brute à la guitare, la fille écrit des poèmes et le grand-père est un bourgeois bohème, écrivain sur le retour et casse-pied en raison de son statut le dispensant de prendre des gants avec les gens qu'il aime. La question de l'intervention en Irak est là pour le décor.
 L'essentiel de l'histoire est résumée en quelques phrases. Dire pourquoi le bouquin ne nous tombe pas sur le museau dès la troisième page relève de l'incantation chamanique. Peut-être le côté apaisant du parti pris narratif de McEwan y est pour beaucoup, un peu comme chez Virginia Woolf. Tout est dans le feutré, le velouté, pas spectaculaire pour deux livres sterling. Même la prise d'otages prend des allures de soirée lecture chez Mémé. L'auteur bichonne ses personnages et ne veut pas trop leur faire de mal, un petit coup de poing par ci, un conflit intergénérationnel passager par là, tout se joue à pas grand-chose, à prendre un chemin plutôt qu'un autre, décision qui bouleverse l'ordre général des choses et qui va inciter les protagonistes à batailler pour que celui-ci se remette en place. McEwan fait entrer la surprise dans une famille où tout semble réglé au quart de poil et, comme elle, on se laisse surprendre par les évènements, on se laisser bercer par le ton flegmatique du récit sans pour autant être trop inquiet, car on le sait d'avance, tout finira bien, la vie normale reprendra son cours entre parties de squash, opérations neurologiques, répétitions et plaidoiries. Un bouquin qui casse pas trois pattes à un canard mais qu'il serait bête de laisser trainer sur la table du salon sans y jeter un œil.

Commentaires