Souvenirs d'un pas grand-chose - Charles Bukowski (1982)

Ecrire pour Bukowski c'est mettre ses tripes sur la table. Écarter les faux-semblants, les non-dits, se regarder dans un miroir et dire ce qu'on y voit sans retenue, sans frein, sans malaise non plus. Dans Souvenirs d'un pas grand chose, l'auteur revient sur ses premières années dans un pavillon de la banlieue de Los Angeles, entre un père à la pédagogie douteuse, inspirée du manuel de gardien de prison de Spandau et une mère soumise à son mari. Lui est au milieu essayant de trouver une troisième voie à une vie qu'il vomit. C'est l'époque où il fréquente l'école, compte ses copains sur les doigts d'une main, s'intéresse aux filles qui ne le lui rendent pas. C'est l'époque où il se réfugie dans Hemingway, Celine ou Lawrence. Un seul maître-mot pour lui : attaquer pour ne pas avoir à se défendre. Des bagarres entre copains aux baffes paternelles, Chinaski se construit une carapace pour survivre, une sorte de parcours initiatique un peu à la manière de Holden Caulfield de Salinger. La comparaison s'arrête là. Caulfield n'aurait pas survécu 5 mn dans le monde de Bukowski.  
Avec ses Souvenirs, l'auteur rompt quelque peu le cours de ses écrits de beuverie en mettant à nu ses douleurs, celles de son enfance, en faisant une œuvre à part dans sa bibliographie. On y découvre un gamin parfois touchant, se réfugiant dans des bras étrangers pour chercher cette affection qu'il n'aura jamais à la maison, un enfant pas gâté par la vie, écorché-vif, persuadé qu'elle sera pour lui un long chemin de croix qu'il faudra arpenter sans relâche jusqu'à la mort. Un bouquin-confession qui apporte la lumière sur les premières œuvres. Incontournable.

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